Après avoir vu dans notre précédent billet les bonnes pratiques concernant la marque employeur, les scenarii d’engagement et la sensibilisation, nous allons nous intéresser aujourd’hui aux influenceurs et ambassadeurs, à l’analyse par audience et au pouvoir des images, images qu’il faut absolument prendre en compte dans le cadre de la gestion de votre réputation.
Les influenceurs sont des parties prenantes de votre e-réputation importantes à analyser, puisqu'ils peuvent constituer à eux seuls un axe essentiel de votre marketing, de votre communication et de vos RP. Parmi les parties prenantes nécessaires au relais de votre stratégie digitale, il faut aussi considérer les ambassadeurs.
Les influenceurs peuvent être des célébrités, des experts du Social Media, des spécialistes de votre secteur, des journalistes. L’influenceur se caractérise souvent par une forte audience, mais il peut aussi être une personne à audience moyenne voire faible (ex: moins de 10 000 followers sur Twitter) mais fédérant une communauté très fidèle et passionnée qui génère un fort engagement et une forte propagation des messages (on parlera de résonnance), parce qu'il produit du contenu très pertinent : on retrouve ici les 3 principaux piliers de l'influence : audience, pertinence et résonance.
Les ambassadeurs sont différents. Ils ont plus rarement une forte audience mais sont très pertinents sur les marques et produits qu’ils aiment. Car c’est ce qui caractérise l’ambassadeur : il aime passionnément certaines marques et s'exprime à leur sujet régulièrement, de manière positive. Il parle spontanément d’un produit, d'une gamme sans y avoir été invité par la marque : c’est à posteriori qu’il sera potentiellement détecté par les marques comme fin connaisseur de ses produits. L’ambassadeur ne se récompense pas forcément comme un influenceur mais doit être valorisé, par exemple via des accès privilégiés à la marque qu'il affectionne.
Pour détecter l’ambassadeur, il conviendra de monitorer les conversations sur vos marques, à tonalité positive et avec une fréquence supérieure à un certain seuil. Ainsi l'ambassadeur peut écrire un billet de blog enthousiaste sur votre marque toutes les semaines, et relayer tous les jours vos actualités sur Twitter tout en les commentant.
Le rôle de l'ambassadeur pour votre marque : l’intérêt de recruter un ambassadeur est remarquable : d’abord, il complète l’influenceur, ne le remplace pas : là où l'influenceur vous sera précieux pour communiquer sur les valeurs de votre marque et initier un 1er contact avec vos clients ou prospects (acquisition et rétention), l'ambassadeur, puisqu'il connait intimement certains de vos produits et en est fan, sera plus utile pour communiquer sur vos avantages clients et vos différenciateurs clés (fidélisation et assistance). L'ambassadeur peut être ainsi “utilisé” pour animer les forums d’entraide par exemple ou témoigner auprès d’un client afin de le fidéliser sur une gamme de produits ou services.
Vos employés sont aussi vos ambassadeurs de marque, surtout corporate : l’etude KRC Research montre que 20% des employés sont des ambassadeurs actifs de votre entreprise. Par ailleurs, un message émanant d’une marque, mais mis en ligne par un employé, est 24 fois plus partagé que lorsqu'il est diffusé par la marque elle-même sur ses canaux officiels (blog, site corporate, compte sociaux).
Brique essentiel de la construction de la marque employeur, la prise de parole des salariés sur leur entreprise constitue une véritable révolution des pratiques pour l'employeur qui doit gérer (guider, charter, encadrer, limiter, animer...) ces messages sur les réseaux sociaux. Pour le moment, seuls 33% des employeurs encouragent les salariés à partager des contenus provenant de l’entreprise.
Pour mettre en place votre système de gestion de l'e-réputation, vous avez naturellement pensé à collecter de l'information sur le web et les réseaux sociaux concernant votre marque. Mais, il faut aller au-delà de la phase de collecte "classique" et penser à vos ressources et réseaux internes, c'est-à-dire au potentiel de vos collaborateurs et dirigeants qui peuvent jouer un rôle essentiel lors de la gestion de bad buzz et de crise réputationnelle.
Il faut considérer internet comme un des canaux de collecte, et non pas comme l’unique source pour votre veille d'e-réputation : Vos collaborateurs peuvent en effet participer fortement aux remontées d’information, la produire, la valider, l'enrichir. Cela permet de confronter la perception terrain à l'analyse du web (ex: le dernier "buzz" négatif a eu très peu d'impact sur nos prospects car ils ne sont pas présents sur ces canaux...), de découvrir de nouvelles sources spécialisées identifiées par des spécialistes. En fonction de vos objectifs et axes d'e-réputation (produits, corporate, politique, commercial, retombées de campagnes de communication...), il faut identifier les fonctions et les relais les plus efficients :
-Réseaux relationnels,
-Experts métiers disponibles au sein de l’entreprise.
Ces communautés vont jouer un rôle essentiel dans l'identification de l'information stratégique en e-réputation, déjà disponible en interne. Il faut en effet penser le système de gestion de l'e-réputation comme un système d'alerte sur l'environnement extérieur couplé à un système de gestion des connaissances internes, indispensable pour bien réagir aux situations les plus sensibles.
Le challenge de la gestion de la réputation n'est pas nouveau. En 2001, un documentaire de la BBC a révélé que de jeunes enfants travaillaient, qui plus est dans de mauvaises conditions, dans une usine du Cambodge sous-traitante du fabricant. Suite à ce reportage, Nike a déclaré qu'ils prendraient des mesures correctives afin de s'assurer que ces abus ne perdurent pas.
En 2010, l'éditeur de logiciel SAP a réalisé une enquête analysant tous les types de dommages liés à la réputation. Elle a montré que plus de 80% des problèmes de réputation se produisaient suite à un décalage entre les informations internes et les informations externes. Dans le cas de Nike, après ses problèmes de 2001, des mesures ont été prises demandant aux fournisseurs de respecter une charte éthique et pour s'assurer que les usines seraient inspectées. Mais les informations collectées par les journalistes les années suivantes ont mis l'accent sur la persistance de problèmes. Certains dans l'entreprise en avaient connaissance mais ils n'ont pas été identifiés par le Codir et l'information n'est pas remontée assez haut.
Dans de nombreux cas, les informations utiles à la résolution ou au moins à la gestion de "crises" existent au sein même des entreprises, mais les problèmes ne sont pas détectés assez vite, les spécialistes n'ont pas été identifiés au préalable, l'information n'est pas acheminée vers les bons cadres dirigeants et les réponses ne sont pas élaborées ou apportées par les bonnes personnes.
La gestion de l'e-réputation n'est pas qu'une affaire de collecte et d'analyse : La qualité et la pertinence de la réponse à une simple prise de parole d'internaute ou à une attaque élaborée est essentielle. Cette qualité dépend de la capacité à répondre dans le bon timing, en disposant des bonnes informations, en utilisant le bon langage et en faisant participer les bonnes personnes (Community manager, porte parole, cadre dirigeant) en cohérence avec le message, la cible et la nature du problème à régler.
Parmi les bonnes pratiques concernant la phase d’écoute de votre réputation (à savoir la collecte de tous les messages, articles et conversions concernant votre marque), il est indispensable de penser aux images.
Le web est devenu visuel, l’image est le premier langage du web.
Ce mouvement de fond s’est intensifié à partir de 2014 : depuis cette année là, ce sont les réseaux sociaux visuels, dédiés au partage de photos et d'images qui connaissent le plus fort taux de croissance notamment pour les utilisateurs actifs : Pinterest, Tumblr et Instagram (étude GlobalWebIndex)
Cette année, l'étude KPCB Internet Trends révèle que le partage des images était en très forte croissance notamment grâce aux applications du groupe Facebook (Instagram, Messenger, WhatsApp) et bien sur Snapchat.
Le challenge : Les internautes communiquent avec l’image pour parler de vote marque, mais pour autant, ils ne vont pas forcement la citer en l’écrivant dans un commentaire ou un hashtag. Il faut donc intégrer, pour votre écoute, des technologies de reconnaissance d'images, qui vont permettre d'identifier le nom de votre marque, son logo au sein de l’image.
Ainsi, ce touriste japonais, content des repas sur Air France ne cite pas la compagnie dans ses tweets mais le logo figure dans l’image. Cet autre passager qui rate sa correspondance ne cite pas non plus la compagnie mais celle-ci est présente dans l’image. Enfin cette image très partagée sur les réseaux sociaux issue de la retransmission TV d’un match de baseball amplifie l'exposition de la marque United, présente dans les publicités au bord du terrain.
96% des internautes sont influencés par la présence d'avis négatifs : 30 % vont renoncer à l’achat ou se tourner vers une autre enseigne (chiffres Ifop) : les avis consommateurs ont un fort impact sur la réputation de votre marque. Certes, Twitter ou Facebook véhiculent de nombreux avis mais si vous vous focalisez sur les seuls réseaux sociaux, vous risquez de rater de nombreuses conversations. Ainsi, si votre secteur d’activité concerne par exemple la santé, la pharma, les jeux vidéos ou les voitures d’occasion, il faut suivre les sites d’avis consommateurs et les forums, sous peine de rater 50 à 80% des conversations sur votre marque ! Certains sites de notation sont incontournables et quasi-monopolistiques pour la réputation de certains secteurs : TripAdvisor, bien sûr, exerce un impact très fort sur la réputation des hôtels et restaurants, mais aussi des sites comme Glassdoor pour la marque employeur (notation des entreprises), Yelp pour les magasins et commerces de proximité, ou encore Opinion Assurances pour le secteur des assureurs et mutuelles évidemment.
Les sites d’avis Consommateurs et de notation sont donc des espaces de conversation indispensables pour votre périmètre de surveillance et d'analyse. Comme souvent en gestion de la réputation, ces sites constituent à la fois des opportunités et des risques pour les acteurs concernés.
-Opportunités car les hôtels et les restaurants peuvent rebondir sur les avis positifs laissés par les internautes, voir en vivre en quasi totalité : c’est le cas de cepetit restaurant, Le Mariette, dans le 7ème arrondissement de Paris, absent des guides traditionnels, encensé par les internautes, et donc intégré dans le classement de TripAdvisor des meilleurs restaurants : “ Travelers' Choice Restaurants”.
-Risques car des clients ou des concurrents mal intentionnés peuvent laisser des avis négatifs, de mauvaise foi, sur votre établissement et nuire fortement à sa réputation. Cela concerne les petits établissements, potentiellement très fortement impactés par des avis négatifs comme les plus grands. Ainsi le Directeur Général Adjoint du groupe Accor déclarait “Cette e-réputation pèse lourd sur le chiffre d’affaires. 1 point sur TripAdvisor, c’est 10% de prix de chambre en plus pour un hôtel, c’est du vrai argent ces 10%, ce n’est pas juste une note pour faire beau, cela fait partie de la perception et de l’image de l’hôtel ". Il se base sur une étude démontrant l’impact d’un point sur TripAdvisor. Bien entendu, l’inverse est également vrai : Un point en moins, c’est une offre moins élevée et de la fréquentation en moins pour l'établissement.
Lors de la phase de monitoring au sens large (collecte, analyse, alertes, engagement, reporting), c’est bien la démarche d’analyse qui est la plus importante car c'est elle qui va donner tout son sens aux données que vous allez collecter.
Ainsi, il ne faut pas raisonner qu’en nombre de mentions : lorsque l’on mesure l'e-réputation d’une marque, on analyse souvent les messages en nombre de mentions à savoir en nombre de tweets, de posts, d’articles dédiés ou citant votre marques et ses produits. C’est un indicateur intéressant, essentiel pour rendre compte du succès d’une campagne ou des reprises d’un bad buzz. Toutefois, il est insuffisant et ne raisonner que par le prisme du nombre de mentions présente des risques. En effet, les mentions regroupent des messages issus de sources très hétérogènes en terme d'impact. 200 twittos ont pu partager votre actualité sur votre lancement produit, sans l’avoir vraiment lu et, de plus, sans générer un réel impact s’ils ne drainent pas une audience suffisamment importante. A l’inverse 2 mentions peuvent représenter 2 articles du Monde, à très fort impact.
L’analyse conjointe par mentions et par audience potentielle (à savoir le nombre d'internautes potentiellement impactés par les messages) peut en effet révéler des choses bien différentes :
Une enseigne de magasins de cosmétiques avait ainsi lancé sa campagne digitale au cours d'un mois de septembre afin de promouvoir une nouvelle marque. Sur l'analyse des messages par mentions, en haut, tout va bien : Un 1er pic a lieu lors du lancement puis d'autre surviennent au cours du mois en fonction des relances sur les réseaux sociaux.
Mais l'analyse par audience sur les mêmes messages révèle tout autre chose : le plus gros pic a lieu le 6 octobre et dépasse le pic de lancement en septembre. Ce second pic correspond a une protestation des syndicats de l'enseigne, reprise dans les mainstreams média à forte audience : Libération, Le Monde, Le Figaro, Le Parisien. Le lancement de la campagne avait été, lui, relayé par quelques twittos, peu d'influenceurs et des médias spécialisés en pub et communication. Résultat : l'impact par audience (reach) a été plus faible que celui du 6 octobre. Pour en savoir plus sur les bénéfices de la mesure de l’audience potentielle pour votre réputation, vous pouvez aussi lire ce billet.
On remarque donc à travers ces bonnes pratiques en gestion de l'e-réputation que, pour la collecte comme pour l’analyse, il est nécessaire de prendre du recul afin d'élargir son horizon et de raisonner en fonction de vos audiences cibles et de la nature de votre activité : ne pas se contenter des seuls réseaux sociaux à la mode, intégrer vos experts internes, donner du sens aux données collectées, explorer les avis consommateurs et les images...
Dans notre prochain billet sur les bonnes pratiques en e-réputation, nous nous intéresserons au profil idéal du Community Manager.